Richelieu

Le cinéma québécois est en ébullition actuellement. Depuis peu, sur nos écrans : Richelieu. Cette fois drame social, ce qui est plutôt rare dans le cinéma québécois. Et le sujet nous touche tous de façon indirecte.

Une jeune traductrice (Ariane Castellanos) se heurte à l’intransigeant Stéphane (Marc-André Grondin), patron de l’usine de transformation agricole dans laquelle elle sert d’interprète aux employés guatémaltèques.


C’est un portrait sans concession que nous brosse Pier-Philippe Chevigny sur le monde des travailleurs étrangers saisonniers. Eux comme nous avons besoin l’un de l’autre. Mais est-ce que tout est permis ? En acceptant ce travail Ariane découvrira les abus des employeurs et bien qu’ayant elle-même besoin de son travail, elle prendra le parti des ouvriers avec qui elle se lie d’amitié et plus particulièrement avec l’un deux. Il y a de l’espoir dans l’être humain.

Il serait facile de jeter la pierre au boss. Dans un monde idéal, Stéphane embaucherait des Québécois. Mais au vu de travail physique très dur et mal payé, personne ne lève la main. Comment faire dès lors pour que son entreprise agricole fonctionne ? Surtout qu’il a des comptes à rendre aux actionnaires, qui ne voient que par les chiffres comptables. Solution : la main-d’œuvre saisonnière étrangère. Pas cher, et eux grâce à ce travail, trouve une façon de gagner assez d’argent pour sortir sa famille de la misère restée au pays. Il faut le vouloir pour abandonner femme et enfants durant plusieurs mois. Ils acceptent tout, de peur de perdre le travail. Le film ne tombe pas dans la caricature des ouvriers mal logés, mal nourris. Il nous démontre les côtés plus pernicieux du système. C’est ainsi que le film gagne ses titres de noblesse. Que fait l’ouvrier s’il a une blessure ? Se fait soigner et être arrêté ou continuer pour gagner son argent ? Le patron ? le déclare-t-il à la CNESST ? Et les ouvriers québécois ? Ils dénoncent ou risque de perdre leur emploi ?

En tant que consommateur, cela porte à réfléchir sur le prix que nous sommes prêts à mettre pour nous alimenter. Car au final la prémisse vient de là : Combien payer pour se nourrir ?

Pour en revenir au film, aucun temps mort. Tout est criant de vérité. On sent que Pier-Philippe Chevigny a fait ses devoirs au travers les moult témoignages qu’il a recueillis. Lui et Ariane Castellanos sont allés au Guatemala pour recueillir le vécu de ces travailleurs. Cela donne des dialogues forts. La scène avec le LA en majuscule est celle de l’hôpital. Elle est dure sans tomber dans le pathos. Ariane crève l’écran. Je trouve que c’est sur elle que repose le film. Cela n’enlève rien aux acteurs dont Marc-André Grondin, mais pour moi celle Ariane qui est la tête d’affiche.


Pour un premier film on peut dire que Pier-Philippe Chevigny met la barre haute. J’ai bien hâte de voir si son prochain film nous fera également réfléchir. Le décor sera placé dans une fonderie en Montérégie en grève.

Distributeur : FunFilms
Durée : 90 minutes

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